Un chef du parti tunisien islamo-conservateur Ennahdha et le directeur d’une radio privée ont été arrêtés lundi soir, selon la formation politique et le média.
Ces arrestations surviennent dans le cadre d'un coup de filet lancé ce weekend par les services de sécurité tunisiens et au cours duquel des militants politiques, d'anciens magistrats et un influent homme d'affaires ont été interpellés.
Le dirigeant d'Ennahdha, Noureddine Bhiri, 64 ans, a été arrêté et "emmené vers un lieu inconnu" lors d'une descente de police à laquelle ont participé une centaine d'agents à son domicile à Tunis, a indiqué à l'AFP un porte-parole d'Ennahdha, Abdelfattah Taghouti.
Cet ancien ministre de la Justice avait déjà été détenu pendant plus de deux mois début 2022, cinq mois après le coup de force du président Kais Saied qui avait suspendu le Parlement contrôlé par Ennahdha, sa bête noire, et s'efforce depuis de le marginaliser.
l avait cessé de s'alimenter dès son arrestation et cessé de prendre ses médicaments avant d'accepter d'être perfusé dans un hôpital où il avait été transféré en état de détention. Malgré sa remise en liberté, M. Bhiri faisait toujours l'objet d'une enquête pour des soupçons de "terrorisme", selon les autorités.
La police a en outre arrêté lundi soir le directeur général de la radio privée Mosaïque FM, très écoutée en Tunisie, Noureddine Boutar, a annoncé ce média.
Samedi, la police tunisienne avait arrêté l'homme d'affaires Kamel Eltaïef, très influent dans les milieux politiques et longtemps l'éminence grise du président déchu Zine el Abidine Ben Ali, ainsi que deux opposants, Abdelhamid Jelassi, ex-dirigeant d'Ennahdha et un militant politique, Khayam Turki, ainsi que deux anciens magistrats.
Homme de l'ombre, M. Eltaïef, 68 ans, est vu par de nombreux Tunisiens comme l'un des symboles de la corruption depuis les années de Ben Ali. Lobbyiste avec de solides connexions diplomatiques, il a fait et défait des carrières dans la police et sur la scène politique.
Selon des médias locaux, les personnes arrêtées ce weekend sont soupçonnées "de complot contre la sûreté de l'Etat". Depuis le coup de force du président Saied, plusieurs hommes politiques font l'objet de poursuites judiciaires dénoncées par l'opposition comme des règlements de comptes.
Dans son communiqué, le parti a dénoncé "le ciblage systématique des dirigeants d'Ennahdha" et une "tentative désespérée de l'autorité putschiste et de son président Kais Saied de couvrir la farce des élections législatives boycottées par 90% des électeurs".
Le premier tour des législatives pour un nouveau Parlement samedi a été marqué par une participation historiquement faible de 11% des inscrits. Cette abstention record est considérée comme un camouflet pour le président Saied.
Lors d'une conférence de presse à Tunis, Ahmed Nejib Chebbi, président du Front de salut national, principal bloc d'opposants à M. Saied et dont fait partie Ennahdha, a dénoncé une instrumentalisation de la justice "pour détourner l'attention des résultats d'un scrutin ignoré par l'opinion publique".
L'opposition accuse M. Saied d'instaurer un régime autoritaire réprimant les libertés et menaçant la démocratie en Tunisie, où la première révolte du Printemps arabe avait renversé en 2011 la dictature de Ben Ali.
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