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M. Mohamed Yassine El Mansouri, l’homme de l’ombre de la diplomatie marocaine

M. Mohamed Yassine El Mansouri, l’homme de l’ombre de la diplomatie marocaine…

De nombreux pays avaient fait appel aux services des institutions sécuritaires marocaines, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et la criminalité.

Un Zoom sur ces yeux qui veillent sur le Maroc: M. Mohamed Yassine El Mansouri, Chef de la Direction générale des Etudes et de la documentation (DGED).

M. Mohamed Yassine El Mansouri, Directeur général de la Direction générale des études et de la documentation (DGED). Pour la première fois de l’histoire du Maroc, c’est un civil qui prend la tête de la DGED (Direction générale des études et de la documentation) le service du contre-espionnage marocain.

M. Mohamed Yassine El Mansouri, Directeur général de la Direction générale des études et de la documentation (DGED), est né le 2 avril 1962 à Boujaâd. Il a été copromotionnaire de SAR le Prince héritier Sidi Mohammed, du collège royal jusqu’au DES à la faculté de droit de Rabat. M. El Mansouri n’a aucune gêne à raconter qu’il allait à l’école à dos d’âne. Son père, estimé et fort estimable, était un notable de la région, sans aucun lien avec la fortune. Aucun de ses frères ni parents n’a changé de métier pour devenir «entrepreneur». D’autres ont travesti quelques parents instituteurs en grands capitaines d’industrie via des crédits bancaires… Mohamed Yassine El Mansouri est effectivement un proche, très proche du Roi. Non seulement il le côtoie depuis l’enfance, mais il est son homme de confiance. Seulement M. Mansouri a une attitude qui contraste avec une certaine opinion des hommes de pouvoir. Il est discret, extrêmement discret. Quelques interlocuteurs ont cru y déceler de la timidité. Ce n’est pas vrai, c’est une manière d’être. Fils de notables de Bejaâd, c’est-à-dire de notables mais de Bejaâd, il a fait toutes ses études avec le Roi. Il n’a gardé de ses origines que l’essentiel, un attachement au petit peuple, une humilité à toute épreuve et, surtout, une grande réserve par rapport à une élite très incertaine. Dans sa manière de vivre, l’homme a réussi un exploit: il sauvegarde de manière farouche sa vie privée, ses amis se comptent sur les doigts des deux mains. D’une civilité avérée, il peut être d’une froideur glaciale. M. Yassine El Mansouri est d’abord un grand lecteur, c’est une véritable encyclopédie de la culture arabo-musulmane. Sa grande culture, il l’utilise malicieusement. Pour éviter de parler de factuel, il est capable de discourir sur le dernier livre concernant le choc des cultures. Il en a rarement l’occasion. L’homme est charmant, mais ultra-réservé. De tous les hommes du nouveau monarque, c’est le moins public. Quand d’autres s’attachaient à se fabriquer des coteries, des affidés, il se concentrait sur son travail. Nommé à la MAP, il montre son savoir-faire et dévoile sa méthode. Il a dirigé la MAP durant pratiquement quatre ans, de novembre 1999 à la fin 2003. Il s’y distingue par un train de réforme internes qui mobilisent les effectifs rédactionnels dans le cadre d’une politique éditoriale plus ouverte, plus professionnelle aussi, à la hauteur des enjeux d’une société démocratique et moderne. Et c’est pratiquement un sans-faute, alors qu’il lui faut en même temps « gérer » l’information officielle d’un gouvernement d’alternance plutôt brouillon et velléitaire.

M. El Mansouri exerçait les fonctions de wali, directeur général des affaires intérieures au ministère de l’Intérieur depuis 2003 jusqu’à sa nomination ce jour par le Souverain. Par ses qualités de négociateur, M. El Mansouri a contribué efficacement à la remise sur les rails des relations maroco-espagnoles avec notamment l’établissement de mesures conjointes en matière de lutte contre l’émigration illégale et le trafic de drogue. Au ministère de l’Intérieur, M. Mansouri a fait montre d’une grande compétence dans la gestion de dossiers aussi sensibles que ceux des élections, de l’émigration et de la lutte contre la drogue, des provinces du Sud ou encore celui de la sécurité. Ses qualités professionnelles et humaines font de lui un interlocuteur crédible auprès de la classe politique avec qui il a eu notamment à organiser les dernières élections communales.

A l’Intérieur, il modernise les RG et s’occupe de dossier lourds

Une fois nommé à l’Intérieur, il se tapit dans son rôle, change la moitié de l’équipe sans avoir l’air d’en faire un objectif, modernise les Renseignements généraux et s’occupe de dossiers lourds. Le Roi l’a chargé des relations avec l’Union européenne dans ce qu’elles ont de plus conflictuel : la drogue et l’émigration clandestine. Il s’en sort bien, si l’on en juge par la réaction des partenaires. Lui ne parle pas, ne présente son bilan qu’à qui de droit, ne cherche ni la médiatisation, ni encore moins la confrontation. Ceux qui le prenaient pour un second couteau, lui-même affidé à quelque puissance de l’ère nouvelle, feraient bien de se raviser.

Carrière. Renseignement, toute !

La carrière de Mohamed Yassine El Mansouri démarre au milieu des années 1980 quand il intègre le ministère de l’Intérieur, en tant que stagiaire au sein du cabinet de Driss Basri. Les témoins de cette époque parlent d’un “garçon discipliné et travailleur, limite effacé”. Il apprend doucement son métier et montre des aptitudes exceptionnelles pour le renseignement et l’analyse de données. Intronisé en juillet 1999, Mohammed VI ne tarde d’ailleurs pas à faire appel aux services de son ancien camarade de classe. En septembre de la même année, de violentes émeutes éclatent à Laâyoune. Deux hommes sont chargés par le monarque de préparer un rapport sur la situation : le général Hamidou Laânigri et Mohamed Yassine Mansouri. “Leur rapport a pointé du doigt la brutalité de la répression ordonnée par Basri, remercié par Mohammed VI”, raconte cet officier à la retraite. Dans la foulée, Hamidou Laânigri est nommé à la tête de la DST et Mohammed Yassine Mansouri devient directeur général de l’agence officielle MAP. Il en améliore, en douceur et sans faire de vagues, les processus de collecte et de traitement de l’information, réactive les bureaux internationaux et étoffe son réseau relationnel personnel.

En mars 2003, El Mansouri revient au ministère de l’Intérieur, mais cette fois en tant que wali directeur de la DAGI, la Direction des affaires générales intérieures. Une structure centrale chargée du contrôle du travail des walis et des gouverneurs, en plus de coordonner et filtrer l’information provenant des différents circuits de l’administration territoriale (moqaddems, caïds, gouverneurs, etc.). Sur le terrain, Mansouri supervise les élections communales de 2003, reçoit les patrons de partis politiques (même les plus extrémistes comme Annahj Addimocrati) et s’ouvre sur plusieurs sensibilités sahraouies. A l’international, il travaille, aux côtés de ses homologues espagnols, français et africains, sur des dossiers épineux comme l’émigration clandestine, le trafic de drogue ou le terrorisme. En février 2005, Mansouri devient le premier patron civil de la DGED, où il continue à travailler sur les mêmes sujets, mais avec des méthodes différentes.

Le patron de la DGED a une botte secrète: sa grande humilité. Pendant plusieurs années, il se rendait à son travail au ministère de l’Intérieur à l’heure. Driss Basri n’était pas gentil avec lui, mais il s’en tenait à l’essentiel, sa formation. Depuis l’avènement du nouveau règne, certains de ses camarades s’empressaient à faire le beau et à se comporter comme des «chasseurs de têtes». Lui s’est concentré sur l’essentiel, les demandes de son seul et unique patron : le Roi.

Il dialogue avec les Européens et les Américains

Si l’Algérie a fait le choix des armes pour lutter contre le réseau terroriste, le Maroc a privilégié, quant à lui, le renseignement. Une mission qui échoit naturellement à la DGED, dont les agents sont devenus habitués aux réunions sécuritaires mondiales au Mali ou au Niger. “El Mansouri est fier que la DGED ait exprimé, la première, son inquiétude face aux risques terroristes dans cette région du monde, explique ce cadre au ministère de l’Intérieur. A l’époque, le Maroc a discrètement partagé les informations en sa possession avec les grandes puissances mondiales. Mansouri ne voulait pas trop en faire pour ne pas être taxé de chercher simplement à déstabiliser le Polisario et légitimer, d’une nouvelle manière, la souveraineté marocaine sur le Sahara”. Aujourd’hui encore, l’intervention de la DGED dans ce dossier relève du secret-défense. En août 2010 par exemple, le ministre espagnol de l’Intérieur nous apprenait, presque par hasard, que le Maroc a fourni “une précieuse assistance” au royaume ibérique afin de libérer deux otages détenus par AQMI. “L’enjeu est important pour le royaume, analyse cet observateur sahraoui. D’un côté, ses services secrets donnent la preuve de leur efficacité. Les fichiers de combattants jihadistes qu’ils ont constitués au fil des années s’avèrent grandement utiles. De l’autre, le Maroc semble affirmer qu’AQMI ne pourra pas élargir ses activités au Sahara tant que ce dernier est sous souveraineté marocaine”. Au passage, Mohamed Yassine El Mansouri devient un interlocuteur incontournable dans la région auprès des Européens et des Américains. On dit que ses visites sont assez fréquentes à Washington, où il disposerait d’entrées privilégiées au sein d’agences de renseignement de premier plan.

Détaillant l’approche marocaine en matière de lutte contre le terrorisme dans ses aspects sécuritaires, religieux et socio-économiques, lors d’une réunion de haut niveau du Comité contre le terrorisme (CTC) relevant du Conseil de Sécurité de l’ONU, le patron des services marocains a fourni des informations précises sur les cellules démantelées et sur les Marocains ayant rallié les mouvances terroristes en Irak et en Syrie, ainsi que sur la collusion avérée du Polisario avec les mouvances terroristes s’activant sur l’axe Alger-Bamako-Niamey.

Le Maroc, a-t-il souligné, a aidé bien des pays à faire échouer des attentats terroristes, notamment les Etats-Unis, la France, la Belgique et l’Espagne, sans compter sa contribution, à l’échelon régional, aux efforts de mise hors d’état de nuire des Ansar Eddine (opération militaire française, nommée Serval, en 2013, au nord du Mali).

Depuis 2005, a rappelé M. El Mansouri, les autorités marocaines ont réussi à démanteler des réseaux terroristes opérés par des membres d’AQMI basés au Sahel, dont les plus actifs sont les structures dénommées « Fath Al Andalous » (2008), « Al Mourabitoune Al Joudoud » (2009), composé de membres du « Front Polisario » et la structure d’Amgala (2011), dont le démantèlement a permis la saisie d’un arsenal d’armes qui allait être utilisé contre des intérêts nationaux et internationaux.

Pour le patron de la DGED, la menace terroriste émanant de la région Sahélo-Saharienne est aujourd’hui exacerbée par des alliances entre AQMI et le polisario, ainsi que par d’autres groupes terroristes, dont le +MUJAO+, +Boko Haram+, +Al Chabab Islami+ en Somalie et +Ansar Acharia+ en Tunisie et en Libye.

« Les services de sécurité marocains ont fourni à leurs homologues occidentaux des renseignements extrêmement importants au sujet de la spectaculaire prise d’otages perpétrée, en janvier 2013, sur le site gazier Aïn Amenas, au sud de l’Algérie, par le groupe du terroriste Belmokhtar +Les signataires par le sang+ », a révélé M. Mansouri, regrettant toutefois un déficit de coopération au regard des menaces terroristes qui guettent cet ensemble géographique et son voisinage immédiat, la région Sahélo-Saharienne.


M. Mohamed Yassine El Mansouri, a participé, sur instructions royales, le samedi 14 septembre 2019, à Ouagadougou, au Sommet extraordinaire de la CEDEAO sur la lutte contre le terrorisme.

M. Mohamed Yassine El Mansouri, est un acteur majeur de la diplomatie africaine du Maroc. Hormis les visites royales dans les différents pays, durant lesquelles il est relativement visible, il accomplit un travail de fourmi dans les coulisses. C’est la cheville ouvrière de la coopération militaire et du renseignement Sud-Sud, dans un continent plombé par l’insécurité, le terrorisme, l’immigration et parfois des guerres civiles. Mais ce que la majorité des Marocains ignorent, c’est que la direction chapeautée par Mansouri effectue également un travail d’investigation et de prospection des opportunités de coopération économique bilatérale, ce qui permet au Maroc d’identifier les besoins de nos partenaires et futurs amis dans le continent en vue d’une meilleure préparation des visites royales.


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