Le makhzen, renvoie en Algérie à une doctrine de pouvoir et à la désignation un mode d’administration étatique en vigueur notamment durant la période de la Régence d’Alger.
Le makhzen, renvoie en Algérie à une doctrine de pouvoir et à la désignation un mode d’administration étatique en vigueur notamment durant la période de la Régence d’Alger. Il correspond à une forme de gestion du lien entre tribu et État central en l’Algérie et au Maghreb préfiguré depuis l’époque fatimide et ziride et se développant particulièrement sous les Zianides.
L’origine du « système makhzen » réside dans l’affaiblissement des États Hafsides, Mérinides et Zianides vers la fin du Moyen Âge lié à la pression espagnole en Andalousie et sur le littoral du Maghreb, à l’avancée ottomane et aux luttes internes. Ces dynasties vont faire appel aux tribus bédouines hilaliennes pour conserver un minimum de pouvoir et leur déléguer le contrôle d’une partie de leur territoire. C’est le système de l’iqta : les tribus prélevaient l’impôt, qu’ils reversaient en partie à leur souverain à qui ils devaient également un service militaire. Ce système, qui fut développé à l’époque de ces trois dynasties, existait déjà sous les Fatimides et fut particulièrement employé par la dynastie des Zianides considérée comme la plus faible de l’époque.
La régence d’Alger et l’épisode colonial
Sur le plan étymologie le mot makhzen signifie « magasin » ou « fisc », et finit par désigner par extension tout l’appareil étatique de la régence d’Alger. À l’origine, il s’applique plus précisément aux grands coffres où étaient déposés les produits des impôts, avant de s’étendre à tout ce que le pouvoir central pouvait acquérir sur ses fonds propres (palais, armée…) ; puis aux tribus, qui à partir d’un territoire concédé, devaient rendre un service au pouvoir en place. À cette époque il se traduit, sur le plan social par la division de la société en tribus dont certaines sont dites makhzen. Ces tribus sont privilégiées : elles fournissent des troupes à la Régence, sont chargées du maintien de l’ordre et de la collecte des impôts. Le concept de « tribu makhzen » s’oppose à celui de « tribu raya », imposables et assujetties. Plus tard, l’émir Abd el Kader supprimera la distinction entre tribus makhzen et raya afin d’unifier son domaine.
Dans l’Algérie coloniale, dès le xixe siècle, le makhzen constitue un mode de domination politique attrayant pour les Français qui dans la continuité de la Régence vont même un temps reconstituer son ancien makhzen. Ce « makhzen colonial » permet aux bureaux arabes de poser les bases d’une hiérarchie de commandement, d’avoir des relais dans l’ensemble du territoire. Outre les dignitaires recrutés parmi les tribus (aghas, khalifas, caïds…), il permet de former un corps de fonctionnaires indigènes composé de groupes subalternes. Ainsi les « khodja » sont chargés des correspondances en arabe, les « chaouchs » s’occupent de police et du renseignement, les « khiela » et « spahis » qui constituent une cavalerie soldée et les « askars » et les « goums » forment une réserve de troupe mobilisable sur demande du pouvoir central, comme du temps de la régence d’Alger.
À propos du démantèlement tribal en Algérie
Le démantèlement de l’ordre tribal, qui s’effectue en Algérie entre 1830 et la Première Guerre mondiale environ, est une réalité qu’on ne peut nier mais qu’on se doit de nuancer. Celui-ci s’est effectué de plusieurs manières : par destruction physique, par dépossession foncière, en discréditant les structures d’autorité traditionnelles et en imposant de nouvelles normes culturelles aux populations autochtones.
Destructions physiques
En dépit des conflits internes (notamment ceux entre tribus makhzen et tribus raya ou siba, ou simplement entre tribus proches), le monde tribal de l’Algérie ottomane avait une certaine cohérence et pouvait être vu comme un système assez complexe et fonctionnel. Cet ordre tribal fut bouleversé par les transformations induites par le régime colonial et en premier lieu par son avant-bras : l’armée. Celle-ci prit les premières mesures d’une politique qui, à moyen terme, devait inéluctablement déstabiliser l’organisation antérieure. Elle le fit en combattant les tribus hostiles à la présence française en Algérie, mais elle le fit aussi en permettant et/ou en suscitant l’accentuation des divisions et des conflits inter et intra-tribaux. Par exemple, la résistance menée par l’émir Abd el-Kader, à la tête des tribus Hasham, Bani Amr et Gharaba, fut anéantie en moins de quinze ans, de 1832 à 1847, du fait d’affrontements directs avec l’armée française, mais aussi en raison des conflits entre tribus – notamment ceux opposant l’armée constituée par l’émir Abd el-Kader et les tribus makhzen (makhzan) des Dûayr et des Zmala.
Le terme « makhzen » donnera le mot « mokhazni » désignant un corps de supplétif des troupes coloniales.
À partir de 1957, le nombre de harkis connaît une forte croissance. C’est la période où la France multiplie les postes sur tout le territoire algérien. C’est une stratégie très coûteuse en hommes qui pousse l’état-major à recruter massivement le plus de forces disponibles. L’expérience de la guerre d’Indochine est encore toute proche, et dès octobre 1955, une fiche du 3e bureau de l’état-major de la 10e région militaire intitulée « Guérilla et contre-guérilla en Algérie » soulignait que « les meilleures troupes de contre-guérilla sont à base d’autochtones ». Vis-à-vis de l’opinion publique métropolitaine et aussi de l’opinion internationale, il est important de montrer que les musulmans d’Algérie se battent majoritairement dans le camp français. Par-delà l’efficacité militaire, les militaires attendent aussi et peut-être même surtout un effet psychologique. Comme l’écrit dans une note un officier supérieur « Par l’intermédiaire de leurs parents, de leurs amis, les harkis contribuent soit à entretenir un climat favorable à notre cause dans leurs villages d’origine, soit au minimum à contre-battre la propagande adverse. » De 1956 à 1962, les harkis étaient des combattants algériens, auxiliaires de l’armée française. Recrutés localement dans les campagnes et les petits centres urbains, ils étaient associés au quadrillage du territoire ainsi qu’aux opérations de maintien de l’ordre autour de leur lieu de recrutement – en théorie, leur région d’origine. Dans une acception plus large, le terme « harkis » était parfois utilisé pour désigner l’ensemble des auxiliaires algériens recrutés pendant la guerre. L’armée française forma jusqu’à cinq catégories différentes d’auxiliaires, correspondant à des unités spécifiques :
les harkis proprement dits ;
les GMPR (groupes mobiles de police rurale) devenus GMS (groupes mobiles de sécurité) en 1958 ;
les makhzens associés aux SAS (sections administratives spécialisées) ;
les GAD (groupes d’autodéfense) ;
les aassès enfin. De quelques milliers en 1957, entre 100 000 et 150 000 hommes participaient à ces unités en 1960, l’acmé de leur engagement.
Sans registres précis, il est impossible de connaître le nombre total d’Algériens ayant ainsi servi du côté français. On peut seulement avancer une estimation comprise entre 200 000 et 400 000 hommes, soit 10 % à 20 % de la population algérienne susceptible d’être recrutée. L’ordre de grandeur témoigne d’un phénomène massif, qui a concerné avec plus ou moins d’intensité la société rurale algérienne dans son ensemble. Les unités auxiliaires se différenciaient des unités régulières par la composition de leurs membres (« Français musulmans ») et par l’attachement à leur territoire…
En janvier 1959, une harka constituée de femmes harkettes est créée à Catinat par le lieutenant français Onrupt:Évolution des divers groupes de supplétifs musulmans en 1957mokhaznisGMPRGADharkasjanvier 19573 5004 7483 5022 186septembre 19575 5005 8245 50010 430
Lire aussi:
Comments