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KSA / EAU, Le jour où MbS a été  »roulé dans la farine » par MbZ?

Pourquoi brosser un double portrait des dirigeants de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, MBS et MBZ? Parce que les destins des deux Mohammed sont intimement liés. Parce qu’ils incarnent aux yeux de nombreux Arabes un « moment du Golfe ». Mohammed bin Salman (MBS) l’Arabie saoudite et Mohammed bin Zayed (MBZ) l’émirati partagent un point commun: les deux gouvernent leur pays bien qu’ils ne soient que des princes héritiers. Ils ont déjà deux guerres à leur actif en tant que princes. La première, au Yémen, qui a débuté au printemps 2015, est menée à coups de bombardements aériens et d’opérations commandos. La seconde, contre le Qatar, qui a démarré début juin, prend la forme d’un blocus économique et d’un déluge de propagande hostile, sur les réseaux sociaux et dans les médias. D’autres similitudes justifient la combinaison de leurs portraits: leurs tendances autocratiques, leurs rêves de pouvoir et, enfin, une certaine conception de la politique et de la société. Sur ce dernier point, il semble évident que l’aîné des deux Mohammed, MBZ, a influencé le plus jeune, MBS.

Entre 2013 et 2015, trois princes ont pris la tête des principales monarchies pétrolières du Golfe: le Qatar, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Cette nouvelle génération de souverains, parmi les plus riches et les plus puissants de la planète, a imposé une nouvelle manière de gouverner…

Le premier à être arrivé au pouvoir, l’émir du Qatar, Tamim al-Thani, 39 ans, lui a construit son soft power sur le sport, avec le contrôle de BeIN, principal réseau mondial de diffusion des événements sportifs, grâce auquel il a obtenu l’organisation de la Coupe du monde de football 2022, suscitant la jalousie de ses voisins. Pour asseoir son influence, il dispose aussi d’Al Jazeera, dont le rôle est considérable dans cette partie du monde. Ses voisins l’accusent de soutenir des groupes islamistes et d’être trop proche de l’Iran… Face à lui : Mohammed ben Salmane, 33 ans, dit MBS, l’ambitieux prince héritier d’Arabie saoudite, qui a engagé son pays dans une guerre meurtrière au Yémen et Mohammed bin Zayed (MBZ) l’émirati

Profitant du blanc-seing donné par le président des Etats-Unis lors de sa visite à Riyad, fin mai, ils ambitionnent d’imposer un nouvel ordre régional.

« La crise actuelle dans le Golfe doit beaucoup à la proximité entre MBZ et MBS, qui donnent l’impression de vouloir remodeler la région à leur main », constate Ibrahim Fraihat, expert en relations internationales au Doha Institute for Graduate Studies.

Les EAU sont une Fédération composée de 7 émirats (Abu Dabhi, Ajman, Charjah, Dubaï, Fujaïrah, Ras el Khaïmah et Oumm al Qaïwaïn), fondée en 1971 par le cheikh Zayed ben Sultan al Nayhan, émir d’Abu Dhabi, dont le fils Khalifa est l’actuel président. Si Abu Dhabi est la capitale de la Fédération, Dubaï semble en avoir pris le leadership économique. C’est pourquoi, aux côtés du président Khalifa ben Zayed al Nayhan et de son frère Mohammed ben Zayed, influent ministre de la défense d’Abu Dhabi, le rôle de l’émir de Dubaï, Mohammed ben Rachid Al Maktoum (qui est aussi Vice-Président, Premier ministre et Ministre de la Défense de la Fédération), est tout sauf négligeable.

Mohammed bin Zayed (MBZ)

Comme les autres pays arabes du Golfe, les Émirats arabes unis souffrent de l’absence de règles de succession établies. Les luttes pour le pouvoir sont donc structurelles. Ils s’opposent à un nombre limité de descendants de Sheikh Zayed, le fondateur de la Fédération, contrairement à une pléthore de prétendants saoudiens par exemple. Depuis la mort du « Père de la nation » en 2004, Sheikh Khalifa bin Zayed est l’émir d’Abou Dhabi et le président de la Fédération. Depuis que Sheikh Khalifa a eu un accident vasculaire cérébral en 2014, un autre fils de Zayed, Mohammed, dirige le pays. Il n’a cependant aucune responsabilité fédérale et n’est que le commandant en second de son émirat, Abu Dhabi, du Conseil exécutif (gouvernement) qu’il préside. Il semble néanmoins porté par une soif insatiable de pouvoir et de reconnaissance.

Intelligence Online rapporte la rencontre qui eut lieu en août 2015 entre Mohammed ben Zayed (MbZ), ministre de la défense d’Abu Dhabi et son homologue saoudien Mohammed ben Salmane al Saoud (MbS) devenu depuis lors prince héritier saoudien. On peut se demander si, à la faveur du renflouement financier de Dubaï par Abu Dhabi, les équilibres internes de pouvoir au sein de la Fédération entre les familles régnantes de ces deux Emirats n’ont pas été modifiés comme le suggère la gestion du dossier yéménite par MbZ, ministre de la Défense d’Abu Dhabi, au lieu du ministre de la Défense de la Fédération (Mohammed ben Rachid Al Maktoum, émir de Dubaï). A l’issue de cette rencontre en effet, MbZ et MbS s’accordèrent pour se partager le pays en zones d’influence. Le contrôle du Nord revenait à l’Arabie saoudite, tandis que les Emirats prenaient le leadership militaire dans l’Est pour lutter contre Al Qaida dans la Péninsule Arabique (AQPA) en coopérant avec l’armée loyaliste et les tribus locales. Le Centre du pays, riche d’infrastructures pétrolières, faisait quant à lui l’objet d’un « condominium » entre les deux pays.

Mohammed bin Salman (MBS)

Les jeux politiques à Riyad depuis l’accession de Salman bin Abdulaziz au trône en janvier 2015 ont révélé un pays en ébullition. La mauvaise santé du roi a précipité les choses et l’a amené à régner tout en laissant son fils Mohammed régner. Ce dernier a réussi à expulser deux princes héritiers des branches collatérales l’un après l’autre et à rejeter les prétentions des autres princes. En un temps record, il «désaudit» ainsi l’Arabie, dont l’épithète officielle n’est peut-être plus aussi pertinente. Le pays a de factodevenir une dynastie salmanite. Ce processus s’est achevé par des manœuvres complexes et au détriment de ses demi-frères, plus âgés que lui et avec lesquels il a des relations difficiles. Ici aussi, une succession pleine et entière est attendue après l’abdication d’un roi de longue durée. Salman est toujours utile pour amortir l’impact des chocs causés par son fils sur le système, mais aussi pour reporter le délicat problème posé par la nomination d’un nouveau prince héritier. Une fois MBS sur le trône, il pourrait en effet reporter toute décision à ce sujet. Le jeune maître du pays se considère comme le refondateur du Royaume. Son modèle est son grand-père Abdulaziz, qui a pris Riyad à l’âge de 26 ans. Son ascension a commencé à l’âge de 24 ans, en 2009, lorsque son père, alors gouverneur de Riyad, l’a nommé conseiller spécial. Son accession au pouvoir est liée au contrôle exercé sur Salman par sa troisième et dernière épouse Fahda (qui n’est pas un Saoud), connue pour sa forte personnalité et dont MBS est le fils aîné et préféré. Son intelligence et son appétit pour le pouvoir sont des atouts importants pour MBS, mais il souffre d’un caractère impulsif lié à son manque d’expérience. ntourée d’ennemis inflexibles de sa propre fabrication et encouragée par des alliés opportunistes déterminés à sucer son sang jusqu’à la dernière goutte, l’Arabie saoudite semble s’être retrouvée dans une situation sans précédent.

MBS mène cette « révolution » sans cacher son appétit pour le pouvoir absolu, comme MBZ, qui semble être son seul conseiller, voire modèle. Le despote n’est guère éclairé par les courtisans qui l’entourent. Comme Mubadala aux Emirats, il a mis en place la Fondation Misk, qui vise en théorie à promouvoir la jeunesse, mais qui est en fait chargée d’attirer de jeunes technocrates entièrement dévoués, révocables à tout moment, et qui rivaliseront avec les structures existantes en dépassement des ministères. Il entend donc remplacer les partisans princiers traditionnels par une clientèle de roturiers qui pourrait passer pour la méritocratie, sous prétexte de lutter contre la corruption. Le MbZ, sobre et prudent, est un partisan crucial de MbS depuis que le roi Salman est monté sur le trône saoudien en janvier 2015 et MbS a commencé sa ascension fulgurante au poste de ministre de la Défense, vice-prince héritier, prince héritier et désormais essentiellement roi en tout sauf son nom. En cours de route, il y a eu l’arrestation de princes et d’hommes d’affaires au Riyadh Ritz-Carlton, ainsi que le meurtre du journaliste dissident, Jamal Khashoggi. Les dépenses de MbS, y compris pour un yacht et un château, se sont également étendues à l’achat du «Salvator Mundi» de Léonard de Vinci, qu’il a offert à MbZ.

Les recommandations de MBZ ont toujours conduit au désastre pour l’Arabie saoudite. Le conflit au Yémen s’est transformé en une guerre d’usure pour le royaume et une opportunité historique pour les Émirats arabes unis.

Aucun gagnant au Yémen

Les Houthis n’ont pas été entravés dans leur conquête du Yémen, et une grande partie du pays est rapidement devenue sous leur contrôle. Bien sûr, les Saoudiens et leurs dirigeants des EAU savaient que les Houthis étaient un groupe mandataire iranien, mais ils supposaient qu’ils étaient plus intelligents que les Iraniens et les Yéménites, en ce sens qu’ils pouvaient impliquer les Houthis et Islah dans un conflit autodestructeur au profit de leur propre allié, Saleh.

Hormis MBZ, il n’y a pas de vainqueur au Yémen aujourd’hui. Le pays a été dévasté, divisé et véritablement retourné à l’âge de pierre. Des jets saoudiens massacrent des civils sans défense à travers le Yémen jour et nuit, tandis qu’une sortie hors de ce marais semble hors de portée. Naturellement, entre-temps, l’implication iranienne au Yémen s’est approfondie d’heure en heure. D’une part, l’Iran fournit un soutien et une protection à son mandataire, mais d’autre part, ce conflit a été un cadeau du ciel pour les Iraniens, qui ont toujours cherché à s’étendre à travers la région.

La guerre qui traîne depuis 2015 n’a pas pu anéantir les Houthis, ni restaurer la légitimité du Yémen; mais ils ont réussi à détruire une nation entière, avec leurs propres pays. Les violation des droits de l’homme dans la guerre du Yémen étant largement diffusée à travers le monde. Bien sûr, l’histoire n’oubliera pas ceux qui étaient à l’origine des souffrances des innocents.

Comme certains fanatiques se vantaient autrefois, l’Iran occupe maintenant quatre pays arabes: le Yémen, l’Irak, la Syrie et le Liban. Tout cela grâce au manque de vision et au manque de sagesse des Saoudiens.

Dans son envie d’être le nouvel homme fort du Moyen-Orient, MBS s’est trouvé un allié et mentor : Mohammed ben Zayed, 58 ans, dit MBZ, prince héritier d’Abu Dhabi et régent des Émirats arabes unis, un stratège militaire qui a fait de son petit pays la principale puissance militaire de la péninsule arabique. Alors que leurs pères et grands-pères réglaient leurs différends dans la discrétion de tentes bédouines, les deux camps s’affrontent désormais à coups de cyberattaques, de blocus économique et de menaces d’invasion.

Si Riyad et Abu Dhabi luttent ensemble contre les rebelles Houthis, on observe toutefois une divergence sur le plan tactique qui ne cesse de croître. En effet, tandis que Riyad soutient le président Abd Rabbo Mansour Hadi, reconnu par la Communauté internationale et ayant succédé à Ali Abdallah Saleh, Abu Dhabi reproche à ce dernier sa proximité avec les Frères musulmans via le mouvement Al-Islah dont il est issu, et ses accommodements avec AQPA.

Qui se réjouit le plus d’une telle perspective?

Aller à la guerre au Yémen aurait été à l’origine une idée de MBZ. Le plan était d’utiliser les Houthis pro-iraniens, qui étaient alors confinés dans l’enclave de Saada dans le nord du Yémen, qui borde la province la plus méridionale de l’Arabie saoudite, comme un outil pour détruire l’affilié des Frères musulmans au Yémen, le parti Islah, qui semblait destiné pour gagner le pouvoir dans les urnes si la démocratie yéménite était autorisée à réussir.

Ne sautez pas aux conclusions: ce ne sont ni les Iraniens ni les Qataris, mais plutôt ses alliés les plus proches de la région, les Emiratis. Il s’agit en particulier du prince héritier d’Abu Dhabi et du souverain de facto des EAU, le cheikh Mohammed bin Zayed (MBZ).

Le rôle jadis détenu par les Saoudiens de leader du monde musulman a été irrémédiablement endommagé, grâce aux intrigues et aux efforts de MBZ , qui a non seulement entraîné le royaume dans la lutte contre les aspirations des peuples arabes du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord pour la liberté et la démocratie, mais a toujours chuchoté à l’oreille du MBS erratique qu’il pourrait en effet devenir roi, si seulement il tenait compte de ses conseils. Les recommandations de MBZ ont toujours conduit au désastre pour l’Arabie saoudite. Le conflit au Yémen s’est transformé en une guerre d’usure pour le royaume et une opportunité historique pour les Émirats arabes unis.

Alors que le premier continue de saigner abondamment, le second a lancé une campagne de division du Yémen en deux, sinon plus, entités, tout en prenant le contrôle des ports les plus stratégiques du pays le long de la côte de la mer Rouge et au large.

Le plan a échoué car, voyant le piège tendu pour eux, Islah a décidé de ne pas engager les Houthis, qui étaient alors alliés avec les troupes commandées par l’ancien président yéménite Ali Abdullah Saleh. L’autocrate yéménite de longue date était de mèche avec les Emiratis et les Saoudiens depuis le début.

La guerre qui traîne depuis 2015 n’a pas pu anéantir les Houthis, ni restaurer la légitimité du Yémen; mais ils ont réussi à détruire une nation entière, avec leurs propres pays. Les violation des droits de l’homme dans la guerre du Yémen étant largement diffusée à travers le monde. Bien sûr, l’histoire n’oubliera pas ceux qui étaient à l’origine des souffrances des innocents.

Sans aucun doute, tout le monde sera tenu responsable. Mais la stabilité dans le Golfe offrira un répit de l’Afrique de l’Est à la Méditerranée orientale.

Il n’y a probablement pas eu d’autre jour où son énorme richesse semblait si totalement inutile. Maintenant, le président américain Donald Trump, agissant publiquement plus en tant que contractant qu’en tant que leader d’une superpuissance, dit à ses amis et alliés saoudiens – comme il l’a fait à plusieurs reprises – qu’ils doivent payer généreusement s’ils s’attendent à ce qu’il intervienne et les défendre.

Bien que, comme on peut le comprendre d’après ses récentes remarques, il préfère ne pas aller en guerre contre l’Iran – qui, selon lui, finira par arriver à la table des négociations, une éventualité qu’il attendait depuis longtemps.

Dans ce magma cynique,

  1. Quel rôle seront potentiellement amenés à jouer les EAU ?

  2. S’agira-t-il, à l’image de leur implication au Yémen, d’être un honest broker capable d’arbitrer la rivalité saoudo-iranienne ?

  3. Les EAU peuvent-ils ainsi devenir un nouvel interlocuteur vecteur de stabilité au Moyen-Orient ?

  4. Ou bien possèdent-t-ils un « agenda caché » et des ambitions propres que révélerait, jour après jour, leur influence croissante ?

Irréparablement endommagé0

Aujourd’hui, il semble plus réaliste que jamais que le prince héritier saoudien Mohammed bin Salman (MBS), si jamais couronné roi, soit probablement le dernier monarque de la dynastie saoudienne.

De la péninsule arabique aux États-Unis, ce film raconte la rivalité entre ces trois princes et la crise sans précédent qu’elle a provoquée dans le Golfe, zone la plus militarisée du monde. Une division qui déstabilise aussi les autres pays du Moyen-Orient, poussés malgré eux à prendre parti…


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