Projet de loi contre l’islam radical et les «séparatismes » finalisé: Quelles sont les principales mesures du texte ?
Destiné à lutter contre l’islam radical et les « séparatismes », le projet de loi comprend aussi des dispositions contre la haine en ligne ajoutées après l’assassinat de l’enseignant Samuel Paty, le 16 octobre. Quelles sont les principales mesures du projet de loi ?
M. Macron a fermement défendu la laïcité française à la suite de ces attaques, qui ont notamment entraîné la décapitation d’un enseignant qui avait montré des caricatures du prophète Mahomet lors d’une discussion de classe le mois dernier.
Tard dans la journée de mercredi, le président et son ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, ont rencontré huit dirigeants du CFCM au palais de l’Élysée.
«Deux principes seront inscrits noir sur blanc [dans la charte] : le rejet de l’islam politique et de toute ingérence étrangère», a déclaré une source au journal Le Parisien à l’issue de la réunion.
La charte stipulera que l’islam est une religion et non un mouvement politique, tout en interdisant «l’ingérence étrangère» dans les groupes musulmans.
Les mosquées pourraient également être obligées de faire preuve de transparence quant à leur financement à l’étranger pour s’assurer qu’il ne provient pas de sources radicales.
La formation du Conseil national des imams a également été décidée.
Le texte renforce, en outre, les pouvoirs des préfets qui pourront s’opposer au versement de subventions publiques aux associations qui ne « respectent pas les valeurs de la République », précise M. Darmanin.
Contrôle des associations
Les ONG et les organisations caritatives soupçonnées d’être infiltrées par des islamistes radicaux sont également dans la mire du gouvernement.
Sur un autre volet, le texte entend « garantir la transparence des conditions de l’exercice du culte » en modifiant la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat en matière de financement des associations cultuelles pour plus de transparence. Les dons étrangers dépassant 10 000 euros seront ainsi soumis à un régime déclaratif de ressources. Gérald Darmanin a annoncé jeudi 19 novembre au soir avoir notifié à ses responsables la dissolution du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF)
Conformément aux instructions du Président de la République et du Premier ministre, j’ai notifié aux responsables du CCIF l’intention d’engager la dissolution de leur structure. Ils ont désormais 8 jours pour faire valoir leurs observations. — Gérald DARMANIN (@GDarmanin) November 19, 2020
Depuis la décapitation de Samuel Paty par un jeune tchétchène de 18 ans radicalisé, le gouvernement fait un lien direct entre «l’islamisme radical» et le «terrorisme». Deux structures ont fait l’objet de dissolution prononcée en Conseil des ministres. Il s’agit de BarakaCity, accusée de «propager des idées prônant l’islam radical» et du collectif «Cheik Yassine», après la mise en cause de son président Abdelhakim Sefrioui, mis en examen dans l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) pour «complicité d’attentat terroriste». Les responsables de BarakaCity et son fondateur, Driss Yemmou, dit Idriss Sihamedi, ont demandé «l’asile politique» au président turc, Recep Tayyip Erdogan.
Le président Macron a également annoncé de nouvelles mesures pour lutter contre ce qu’il a appelé le «séparatisme islamiste» en France.
Ces mesures comprennent un projet de loi de grande envergure qui vise à prévenir la radicalisation. Il a été dévoilé mercredi, et comprend des mesures telles que
Des restrictions sur l’enseignement à domicile et des sanctions plus sévères pour ceux qui intimident les agents publics pour des raisons religieuses.
Un volet éducation prévu
Un volet éducation vise par ailleurs à lutter contre les écoles associatives clandestines et met fin à la scolarisation à domicile pour tous les enfants dès 3 ans Donner aux enfants un numéro d’identification conforme à la loi qui serait utilisé pour s’assurer qu’ils vont à l’école. Les parents qui enfreignent la loi risquent jusqu’à six mois de prison ainsi que de lourdes amendes.
Les parents qui scolarisent leurs enfants à domicile risquent jusqu’à six mois de prison en vertu de nouvelles mesures de lutte contre l’extrémisme islamique en France. Le projet de loi, qui a été dévoilé mercredi, en fera un crime pour les enfants d’apprendre à la maison. Il s’agit d’une tentative d’empêcher les enfants d’être influencés par des radicaux religieux, a rapporté le Times.
D’autres mesures de la législation comprennent des moyens de garantir que les écoles peuvent résister aux demandes de réduction des cours d’éducation religieuse et sexuelle.
Ils donneront aux conseils locaux le pouvoir de refuser des heures de baignade séparées pour les hommes et les femmes et permettront également de réprimer les discours de haine en ligne.
Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur, a déclaré que plus de filles que de garçons étaient gardées à la maison.
«Dans certaines régions, il y a plus de garçons que de filles quand on sait que statistiquement, plus de filles naissent. C’est un scandale », a-t-il déclaré dans des commentaires rapportés par le Times.
L’enseignement à domicile ne sera autorisé que si «impossible pour des raisons liées à la situation (de l’enfant) ou à celle de la famille».
Les parents qui ignorent la loi pourraient aller en prison jusqu’à six mois ou être condamnés à une amende de 7 500 € (6 709 £).
« Nous devons sauver nos enfants des griffes des islamistes », a déclaré mercredi M. Darmanin au journal Le Figaro. Le projet de loi sera discuté par le cabinet français le 9 décembre.
Samuel Paty, le professeur qui a été tué devant son école le mois dernier, a été la cible d’une campagne de haine en ligne avant sa mort le 16 octobre.
Le journal Le Monde a publié des courriels envoyés entre Paty et ses collègues dans les jours qui ont suivi la diffusion des dessins animés en classe.
« C’est vraiment affligeant, d’autant plus que cela vient d’une famille dont l’enfant n’était pas dans ma leçon et n’est pas quelqu’un que je connais », a écrit Paty. « Cela devient une rumeur malveillante. »
Il a ensuite écrit dans un autre courriel : « Je ne ferai plus d’enseignement sur ce sujet – je choisirai une autre liberté comme sujet d’enseignement. »
Le projet de loi érige également en infraction le partage des renseignements personnels d’une personne d’une manière qui lui permet d’être identifiée ou localisée par des personnes qui veulent lui nuire. Les auteurs de violence en ligne pourront désormais être déférés en comparution immédiate, grâce à la création d’un pôle de magistrats spécialement dédié à la lutte contre la haine en ligne. « Nous allons faire en sorte que ceux qui diffusent ce poison qu’est la haine en ligne soient immédiatement jugés devant le tribunal correctionnel dans le cadre d’une comparution immédiate », a précisé Eric Dupont-Moretti, le ministre de la Justice, ce mercredi sur RTL.
Propos haineux sur Internet : « La loi de 1881 protège les journalistes et les canailles. Moi je veux viser les canailles qui doivent être immédiatement déférées en cas diffusion de contenus haineux », @E_DupondM dans #RTLMatin avec @VenturaAlba pic.twitter.com/Slarj3BOJs — RTL France (@RTLFrance) November 18, 2020
Au début de cette année, le président Macron a décrit l’Islam comme une religion « en crise » et a défendu le droit des magazines à publier des caricatures du prophète Mahomet. De telles représentations sont largement considérées comme taboues dans l’Islam et sont jugées très offensantes par de nombreux musulmans.
À la suite de ces commentaires, le leader français est devenu une figure de la haine dans plusieurs pays à majorité musulmane. Les protestataires ont également appelé au boycott des produits français.
En France, la laïcité de l’État est au cœur de l’identité nationale du pays. La liberté d’expression dans les écoles et autres espaces publics en fait partie, et la restreindre pour protéger les sentiments d’une religion particulière est considéré comme une atteinte à l’unité nationale.
La France compte la plus grande population musulmane d’Europe occidentale.
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