En Tunisie, la congélation d’ovocytes, le débat sur une ouverture plus générale de cette pratique s’est implantée dans l’actualité
En Tunisie, la législation autorise les femmes mariées ou célibataires à congeler leurs ovocytes pour des raisons essentiellement médicales. Mais le débat sur une ouverture plus générale de cette pratique s’est implantée dans l’actualité après l’annonce de la chanteuse, Nermine Sfar, de congeler ses ovocytes.
C’est seulement en 2019 qu’a été adoptée au Maroc une loi sur la procréation médicalement assistée pour les personnes mariées. La congélation des ovocytes chez les célibataires y est permise en cas de pathologie comme le cancer, affirme le professeur Jamal Fikri, vice-président du Collège marocain de la fertilité. Mais pour la «préservation sociétale» de la fertilité, «les gens qui ont les moyens partent à l’étranger, comme pour les dons d’ovules ou de sperme», estime-t-il.
En Algérie, aucune loi n’encadre une pratique autorisée uniquement aux femmes mariées, moyennant signature d’un contrat avec la clinique.
En Libye, la préservation de la fertilité des femmes célibataires n’existe pas, selon plusieurs médecins.
En Tunisie, la congélation d’ovocytes fait débat
«J’ai décidé de congeler mes ovocytes » : cette annonce de la chanteuse Nermine Sfar, star des réseaux sociaux, a déclenché un débat en Tunisie, où des femmes réclament la libéralisation de cette pratique hors indications médicales. Mme Sfar, 31 ans, conseille aux célibataires occupées par des études ou leur carrière professionnelle de préserver leur fertilité pour qu’un jour « elles réalisent leur rêve d’être mère».
Nermine Sfar, star tunisienne des réseaux sociaux, a conseillé aux célibataires occupées par leurs études ou leurs carrières professionnelles de préserver leur fertilité pour réaliser leur rêve d’être mère un jour .
« La demande existe depuis longtemps, mais elle s’est accrue au cours des cinq ou six dernières années. La demande est devenue quotidienne, et cela est dû à l’évolution de la société tunisienne. » Selon Fethi Zhiwa, responsable de la clinique de fertilité à l’hôpital Aziza Othmana de Tunis
L’opération consiste à prélever les ovocytes, les congeler et les stocker dans de l’azote liquide en vue d’une grossesse ultérieure. En Tunisie, le stockage est fixé par la loi à cinq ans, renouvelable après demande écrite des patientes.
Depuis deux ans, Nayma Chermiti, 40 ans, chroniqueuse d’une télé locale, désire congeler ses ovocytes.
« Cette législation injuste concernant la congélation des ovules ne correspond pas à l’évolution des femmes et de leurs responsabilités. Les femmes tunisiennes sont premières ministres, PDG, ministres… Beaucoup de femmes travaillent aujourd’hui et leurs priorités ont changé, l’âge du mariage est de plus en plus avancé, et c’est pourquoi nous qualifions la loi sur la congélation des ovocytes de discriminatoire envers les femmes célibataires. »
Des internautes ont jugé ce dossier secondaire, mais d’autres ont souligné son importance dans une nation pionnière dans le monde arabe en matière de droits des femmes.
Pour la féministe Yosra Frawes, la chanteuse Nermine Sfar a « démocratisé un sujet rarement évoqué par le passé en Tunisie, car la société civile était préoccupée par d’autres questions« .
« Grâce aux réseaux sociaux, il y a une libération de la parole, des sujets qui étaient tabous sont démocratiquement débattus » aujourd’hui, dit-elle à l’AFP.
Depuis 2014, près d’un millier de patientes ont congelé leurs ovocytes, dont plus de 80 % étaient célibataires.
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