Face à la crise sanitaire liée à pandémie de nouveau coronavirus qui paralyse la planète, les marchés pétroliers continuent de plonger, en particulier le prix du brut américain qui a atteint son plus bas niveau depuis 1998.
Le prix du baril de pétrole américain (WTI) a touché un plus bas niveau historique (négatif) sur des marchés qui n’en finissent pas de baisser depuis des semaines, entre paralysie économique, offre trop abondante et guerre des prix du brut.
Le baril américain West Texas Intermediate (WTI) a dégringolé de plus de 18,7 % à 14,84 dollars l’unité dans les premiers échanges asiatiques, ce lundi, tandis que le baril de Brent de la mer du Nord reculait de 1,5 %, à 27,64 dollars le baril. A la mi-journée, le WTI enregistrait 35% de chute, à 11,7 dollars et en fin d’après-midi, il chutait sous les 10 dollars symboliques avant de passer à 1 cent dans la soirée !
Une chute de la consommation historique
L’Opep anticipe pour 2020 « un choc historique, brutal, extrême et d’ampleur planétaire ». Selon les prévisions dévoilées dans son rapport mensuel, jeudi dernier, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) attend une consommation mondiale atteignant cette année 92,82 millions de barils par jour (mbj), soit une baisse « sans précédent » d’environ 6,85 mbj par rapport à 2019 (-6,87 %). Il devrait s’agir du premier recul annuel de la consommation pétrolière mondiale depuis 2009 et la crise financière.
« La pandémie de Covid-19 affecte désormais la demande pétrolière de nombreux pays et régions, avec un impact sans précédent sur les besoins, notamment en carburants pour les transports », relève l’Opep alors que les flottes des compagnies aériennes restent clouées au sol et que les mesures de confinement de par le globe paralysent les déplacements. Dans ce contexte, la demande mondiale de brut devrait dégringoler de 12 millions de barils par jour au deuxième trimestre par rapport à l’an dernier, avant une reprise timide : le repli attendu serait 6 mbj au troisième trimestre et d’environ 3,5 mbj sur les trois derniers mois de l’année..
La chute du WTI est amplifiée par des facteurs techniques puisque le contrat à terme d’échéance mai arrive à expiration mardi mais l’échéance juin est elle aussi en net repli, de % à dollars, mais elle traduit aussi le déséquilibre persistant entre l’offre et la demande.
Selon les derniers chiffres en date de l’EIA, l’agence fédérale américaine d’information sur l’énergie, les stocks de brut aux Etats-Unis ont augmenté de 19 millions de barils en une semaine, une hausse sans précédent, pour atteindre 503 millions de barils.
Et on estime à 160 millions de barils, un record et deux fois plus qu’il y a deux semaines, la quantité de brut stockée à bord de pétroliers stationnés au large en attendant une hypothétique remontée des cours.
« Comme la production reste relativement peu touchée, les stocks augmentent de jour en jour. Le monde consomme de moins en moins de pétrole et les producteurs réalisent désormais que cela doit se traduire dans les cours« , explique Bjornar Tonhaugen, responsable des marchés pétroliers au cabinet d’études spécialisé Rystad.
Parallèlement, la plupart des analystes jugent les baisses de production décidées récemment par les pays de l’Opep et leurs alliés, qui représentent 20 millions de barils par jour (bpj), insuffisantes pour compenser l’effondrement de la demande, estimé à 30 millions de bpj, soit quelque 30% de la consommation de la planète.
Les marchés du pétrole n’en finissent pas de plonger depuis des semaines alors que les restrictions de déplacements dans de nombreux pays et la paralysie de nombreuses économies à cause de la crise du coronavirus ont fait fondre la demande, d’autant qu’une profonde récession s’annonce dans le monde.
Côté offre, le marché a été inondé de pétrole à bas coût après que l’Arabie saoudite, membre éminent de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), a lancé une guerre des prix avec la Russie pour obtenir un maximum de parts de marché.
Les deux pays ont mis un terme à leur différend au début du mois en acceptant, avec d’autres pays, de réduire leur production de près de 10 millions de barils par jour pour stimuler les marchés touchés par le virus.
La baisse de plus de 60% du prix du baril depuis janvier compromet la rentabilité de nombreuses compagnies pétrolières, notamment dans le pétrole de schiste en Amérique du Nord, ce qui se traduit par des fermetures de puits et des coupes dans les investissements.
Ce mouvement se répercute sur l’ensemble du secteur: le géant américain des services parapétroliers Halliburton a annoncé lundi une perte d’un milliard de dollars et dit s’attendre à une poursuite de la baisse de son chiffre d’affaires et de sa rentabilité.
Exportations de pétrole : La part de l’Algérie baissera à 816.000 barils à compter du 1er mai
Évidemment, cette dégringolade des cours du pétrole risque d’entraîner une réaction en chaîne et d’accélérer la récession dans certains pays comme l’Algérie, le Venezuela ou le Mexique qui vivent en grande partie de la manne financière du pétrole. Selon les analystes, la prochaine réunion de l’Opep qui doit se tenir en juin pourrait encore être tentée de fermer les robinets au risque de voir exploser cette organisation avec des pays qui n’accepteront pas cette nouvelle baisse.
Face à sa dépendance au secteur des hydrocarbures, l’Algérie subit de plein fouet la nouvelle chute des prix du pétrole.
Le ministre de l’énergie, Mohamed Arkab a indiqué dimanche à Alger que la part de l’Algérie en matière d’exportation de pétrole baissera à 816 000 barils/jour à compter du 1er mai 2020.
Le déficit budgétaire sera accentué
La chute du prix du pétrole va accentuer la crise financière et touchera aussi le secteur industriel ayant besoin de réforme et d’investissement pour se relancer. Les difficultés des entreprises vont s’intensifier faute de financement ce qui aura une répercussion désastreuse sur le secteur de l’emploi qui ne cesse de se dégrader.
Par ailleurs, cette chute va aussi contribuer à un recul des réserves de change qui sont passées à moins de 60 milliards de dollars au début de l’année. Ces réserves qui ont toujours servi aux gouvernements successifs de fonds pour colmater les brèches des déficits budgétaires ne pourront plus répondre à ces besoins. Une situation qui mettra le gouvernement devant le fait accompli et qui l’obligera à prendre d’autres mesures.
Selon le communiqué de la « Présidence de la République » sanctionnant la réunion périodique du Conseil des ministres présidé via la visioconférence par le « chef de l’Etat » Abdelmadjid Tebboune, le « ministre » de l’énergie a présenté un exposé sur cette crise inédite que connaissent les marchés mondiaux du pétrole en raison de la baisse de la demande due à la stagnation de l’économie mondiale suite à la propagation de la pandémie du nouveau coronavirus et la production anarchique de certains pays, ce qui a eu pour effet une saturation des marchés et un effondrement des prix.
L’exposé a rappelé qu’en vertu de l’accord du 12 avril courant de l’OPEP + relatif à la baisse de la production en trois étapes jusqu’à avril 2022, la part des exportations de l’Algérie va baisser, pour une première étape, de 241.000 barils/jour, puis de 816.000/barils/ jour à compter du 1er mai.
Cette part augmentera à partir du premier juillet jusqu’à 864.000 barils/jours avant d’atteindre le seuil de 912.000 barils/jours entre janvier 2021 et avril 2022.
Intervenant à l’issue de l’exposé, le « Président de la République » s’est interrogé jusqu’à quand devrons nous rester tributaire des fluctuations du marché mondial du pétrole?, mettant l’accent sur « la nécessité de se tourner résolument et avec détermination vers l’industrie pétrochimique, le développement des secteurs de l’industrie et de l’agriculture et l’exploitation des ressources humaines sortant chaque année de nos universités afin de permettre aux jeunes de mettre en avant leur génie habituel ».
Le « Président » Tebboune a insisté également sur la nécessité de « s’orienter immédiatement vers l’investissement dans le secteur des énergies renouvelables pour l’exportation afin d’immuniser notre indépendance économique contre toute éventualité pouvant se produire sur le marché pétrolier ».
Dans le même contexte, le « Président de la République » a appelé Sonatrach à « élargir ses plans d’investissement dans les projets pétroliers à l’étranger afin d’améliorer les recettes de l’Etat ».
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