Le Sénat colombien exprime son "rejet catégorique" et "son désaccord total" avec la décision du président de reconnaître la pseudo "rasd"
Le Sénat colombien a exprimé son "rejet catégorique" et "son désaccord total" avec la décision du président Gustavo Petro (gauche) de rétablir les relations diplomatiques avec l'entité fantoche de la "rasd", ce qui "va à l'encontre des principes fondamentaux de la diplomatie colombienne".
Cette position du Sénat a été exprimée à travers une motion signée par une écrasante majorité de 62 sénateurs sur 108 et représentant les partis politiques colombiens les plus importants, dont certains de la coalition au pouvoir.
La motion a été lue mardi en session plénière de la chambre haute, la plus puissante du Parlement, par le secrétaire général du Sénat, Gregorio Eljach Pacheco, et retransmise en direct par la chaine de télévision du Sénat, ainsi que sur les réseaux sociaux du Congrès.
"Les Sénateurs de la République de Colombie, soussignés, exprimons notre rejet catégorique et notre désaccord total avec la position adoptée le 10 août 2022 par le ministère des Relations extérieures, qui a réaffirmé la validité d'un communiqué conjoint signé le 27 février 1985, avec l’autoproclamée 'république arabe sahraouie démocratique (rasd)' ", lit-on dans cette motion.
"La décision prise par le ministère colombien des Relations extérieures en août dernier, qui va à l'encontre de l'un des principes fondamentaux de la diplomatie colombienne, à savoir la non-ingérence dans les affaires internes des pays, a des conséquences profondes et a ruiné les excellentes relations que nous avons toujours entretenues et souhaitons continuer à entretenir avec le Maroc", ont mis en garde les signataires de la motion.
Dans cette motion, initiée par le sénateur Germán Alcides Blanco Alvarez, membre du Parti Conservateur (au pouvoir) et ex président de la Chambre des Représentants, les sénateurs ont profondément déploré la décision "de rétablir des relations diplomatiques avec ce mouvement séparatiste qui s’autoproclame comme pays, mais qui, en réalité, n'est pas reconnu par la grande majorité des pays du monde, encore moins par les Nations Unies".
Les représentants de neuf partis au Sénat, toutes tendances idéologiques confondues, ont souligné que "cette décision qui concerne la souveraineté et l'intégrité territoriale du Maroc, pays avec lequel la Colombie entretient des relations diplomatiques depuis plus de 43 ans, est paradoxale", estimant qu’"en déterrant une résolution datant de plus de 37 ans, il est évident que cette décision a été prise sans évaluer la situation actuelle, ni en mesurer les conséquences, affectant profondément les excellents liens d'amitié qui nous lient historiquement au Maroc".
Le Royaume est "un grand pays ami et allié, qui représente pour la Colombie un partenaire stratégique et privilégié en Afrique et dans le monde arabe, au regard de son leadership et la reconnaissance dont il jouit au niveau régional, continental et mondial", a soutenu la motion, qui a été remise à l’ambassadeur du Maroc en Colombie, Farida Loudaya et sera soumise par le Sénat à la Présidence de la République et au ministère des Relations extérieures.
"Depuis 1985, ajoute la motion, le monde a évolué, et le différend autour du Sahara aussi, une affaire qui a pris un tournant décisif en 2007, quand le Maroc a présenté l'initiative pour la négociation d'un statut d'autonomie de la région du Sahara, en vue de sortir du statu quo et résoudre un différend régional qui dure depuis près d'un demi-siècle".
À cet égard, les sénateurs colombiens ont fait observer que la Colombie a maintenu, pendant de nombreuses décennies, une position constructive, soutenant les efforts déployés par le Maroc en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable sur la base de cette Initiative, dont la prééminence est consacrée par 18 résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies depuis 2007, et qui a été qualifiée de "sérieuse, crédible et réaliste", tant par le Conseil de Sécurité que par la Communauté Internationale.
Les sénateurs colombiens se félicitent, par ailleurs, que "ces dernières années, les relations entre la Colombie et le Maroc ont atteint un niveau optimal et jamais vu auparavant. Au niveau multilatéral, et notamment dans le cadre de la coopération Sud-Sud, le Maroc et la Colombie ont toujours partagé une convergence de vues sur de nombreuses thématiques régionales et internationales d'intérêt commun".
"Au niveau bilatéral, le haut niveau des relations entre nos deux pays s'est traduit par des faits concrets et extrêmement bénéfiques pour nos deux nations. Les liens politiques, économiques, sociaux, touristiques, académiques et humains ont été renforcés grâce aux accords et conventions signés entre Bogota et Rabat, dont notamment l'accord sur les services aériens et l'accord d'exemption de visa pour les détenteurs de passeports ordinaires", ont-ils poursuivi.
Et d’ajouter que le Maroc "est le premier pays africain à conclure un accord bilatéral avec la Colombie dans ce domaine, qui non seulement ouvre les portes du Maroc aux Colombiens, mais permet également aux Marocains de visiter la Colombie, renforçant ainsi notre tourisme national".
Aussi, les sénateurs colombiens ont souligné "d'autres accords en cours et qui sont d'une grande importance pour notre pays, dans des secteurs aussi stratégiques que l'agriculture, les énergies renouvelables, les chemins de fer, les ports et l'artisanat".
Ils ont aussi relevé l’importance du Maroc en tant que porte d'entrée de l'Afrique et du monde arabe et un pays à l'avant-garde dans des secteurs clés pour les intérêts de la Colombie, ce qui en fait un partenaire stratégique dans de multiples secteurs d’une importance primordiale.
"C'est pour cette raison que, dans le cadre du respect total de l'intégrité territoriale des Etats membres de l'ONU, d'autant plus que cette question est d'une importance fondamentale pour le Maroc, puisqu'elle concerne son intégrité territoriale et sa souveraineté, les Sénateurs de la République soussignés, exhortons le Gouvernement du Président Gustavo Petro et son ministère des Relations Extérieures à procéder à une révision de la décision adoptée et de soutenir les efforts du Secrétaire Général des Nations Unies et du Conseil de Sécurité, pour parvenir à une solution politique, pragmatique, réaliste et durable à ce différend régional, conformément à la légalité internationale, et promouvoir la paix et la stabilité dans cette région du monde", conclut la motion.
Les sénateurs signataires de cette motion représentent neuf partis politiques colombiens, dont des formations de la coalition formant le gouvernement Petro: Parti Conservateur, Parti Libéral, Parti U (Parti Social d’Unité Nationale) et le parti de l’Alliance Verte.
Parmi les sénateurs s’opposant à la décision de Petro figurent aussi des membres de partis de l’opposition à l’instar du parti du Centre démocratique, du parti de la Ligue des gouverneurs anti-corruption (parti du rival de Petro au deuxième tour, Rodolfo Hernandez), ainsi que des représentants de partis indépendants comme Changement Radical, Parti Mira et Colombia Justa Libres.
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