Pour la énième fois, Alger rappelle son ambassadeur en France
Le ministre Tunisien des Affaires étrangères, Othman Jerandi, limogé par le président
La militante franco-algérienne Amira Bouraoui échappe à une extradition vers Alger depuis la Tunisie après l’intervention de la France
Une tentative avortée de l’enlèvement en Tunisie de la journaliste Amira Bouraoui. Arrêtée en Tunisie alors qu’elle tentait de prendre l’avion pour Paris, la militante franco-algérienne risquait d’être expulsée vers l’Algérie, où elle fait l’objet d’une interdiction de sortie du territoire. Elle a finalement pu décoller pour l’Hexagone.
Selon le quotidien français Le Monde, elle a été "accueillie quelques heures à l'ambassade de France" avant d'obtenir "du président tunisien Kaïs Saïed l'autorisation de rejoindre la France".
L’intervention coordonnée de ses avocats tunisien (Maître Hashem Badra) et français (François Zimeray), mais aussi de certaines associations des droits humains, a fait réagir l’ambassade de France à Tunis, qui a placé la journaliste sous sa protection. Selon le journal Le Monde, Amira Bouraoui «a dû à sa nationalité française la protection diplomatique de Paris qui, après l’avoir mise en sécurité quelques heures à l’ambassade de France à Tunis, a obtenu du président tunisien, Kaïs Saïed, l’autorisation de la laisser rejoindre la France au lieu de l’extradition vers Alger à laquelle elle semblait condamnée».
Pour la énième fois, Alger rappelle son ambassadeur en France
L'Algérie a annoncé mercredi le rappel pour consultations de son ambassadeur en France, accusant des diplomates d'avoir procédé à "l'exfiltration clandestine et illégale" via la Tunisie de la militante et journaliste algérienne Amira Bouraoui.
Cette polémique illustre une énième fois la nature volatile des relations en Alger et l’ancienne puissance coloniale.
Début avril 2020, l’ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, avait été convoqué aux Affaires étrangères après des déclarations tenues par un intervenant sur la chaîne internationale France 24, à propos de l’aide médicale chinoise, propos qui avaient fortement déplu aux autorités algériennes.
L’Algérie a décidé ce mercredi 27 mai 2020 de rappeler “immédiatement” pour consultations son ambassadeur en France, à la suite de la diffusion la veille de documentaires télévisés sur le mouvement de contestation antirégime, dans un climat de défiance à l’encontre des médias étrangers.
L’Algérie a décidé, samedi 2 octobre 2021, de rappeler « pour consultations » son ambassadeur à Paris, Mohamed Antar Daoud, a annoncé la télévision publique en citant un communiqué officiel de la présidence algérienne et en précisant qu’un autre communiqué explicatif suivrait. L’Algérie a justifié ce rappel par son « rejet de toute ingérence dans ses affaires intérieures ». Sa décision fait suite aux « déclarations attribuées » au président français, Emmanuel Macron....
Le ministre Tunisien des Affaires étrangères, Othman Jerandi, limogé par le président Kaïs Saïed
Une décision prise par le président tunisien au lendemain d’une crise diplomatique impliquant Tunis, Alger et Paris.
C’est par un court communiqué diffusé sur les réseaux sociaux que les Tunisiens ont appris qu’Othman Jerandi, jusqu’ici ministre des Affaires étrangères, était démis de ses fonctions par le président Kaïs Saïed. Il est remplacé par Nabil Ammar, auparavant ambassadeur de la Tunisie auprès de l'Union européenne.
L'annonce semble avoir surpris le ministre lui-même qui, quelques minutes auparavant, partageait encore ses dernières actualités officielles sur Twitter. «Mes fonctions de ministre des Affaires étrangères ont pris fin après 3 ans dans une circonstance délicate, ma seule boussole était l'intérêt suprême de la Tunisie », a réagi sur Twitter M. Jerandi, ajoutant que : «Où que je sois, je resterai au service de ce pays. Nous sommes tous de passage et la Tunisie reste le témoin de ceux qui l'ont aimée et qui lui ont été fidèles ».
Ce renvoi intervient au lendemain d’un bras de fer tendu entre Tunis, Alger et Paris autour du cas d’Amira Bouraoui. Cette opposante au régime algérien de nationalité algérienne et française s’était réfugiée en Tunisie, d’où elle souhaitait s’envoler pour la France. Les Algériens demandaient aux Tunisiens de la renvoyer instamment mais les autorités françaises ont réussi à obtenir, à la dernière minute, qu’elle quitte le territoire tunisien pour la France.
Alors que la Tunisie a opéré un rapprochement remarqué avec Alger ces dernières semaines, cet incident diplomatique vient brouiller les relations avec l'Algérie.
Bête noire du régime algérien
Cette journaliste à Radio-M, média privé, animait jusqu’à récemment une émission de débat politique intitulée «CPP» (Café politique presse), au cours de laquelle elle a l’habitude de décortiquer, avec ses invités, les dérives répressives des dirigeants de «l’Algérie nouvelle». Radio-M diffuse actuellement ses émissions sur le web depuis l’emprisonnement de son patron et fondateur, le journaliste Ihsane El Kadi, et la mise sous scellés de ses locaux en décembre dernier.
Amira Bouraoui, médecin de formation âgée de 46 ans, s'est fait connaître en 2014 avec son engagement dans le mouvement 'Barakat' qui a mené une campagne contre le quatrième mandat du président défunt, Abdelaziz Bouteflika. Elle a tenté plusieurs fois de quitter l'Algérie ces derniers mois pour rendre visite à son fils établi en France, mais en vain, selon le site du média algérien radio M où elle animait depuis septembre une émission politique.
Amira Bouraoui a remercié "tout ceux qui ont fait en sorte qu'(elle) ne (se) retrouve pas une autre fois derrière les barreaux", mercredi sur sa page Facebook, citant les ONG Amnesty International et Human Rights Watch (HRW), les journalistes et les personnels consulaires de l'ambassade de France en Tunisie.
Elle a assuré que son départ pour la France n'est pas "un exil" et qu'elle sera "de retour très vite" en Algérie.
"On ne quitte pas sa terre par gaieté de cœur. Il peut nous arriver de décider de partir car on n'en peut plus de tant d'injustice. Interdire un citoyen de voyager est une atteinte à ses droits les plus élémentaires surtout quand la constitution stipule que l'interdiction ne peut être que de 3 mois renouvelable une seule fois et qu'on vous interdit de voyager pendant des années tout en maintenant une pression sans commune mesure sur vous. On vous empêche de travailler, de voyager on vous poursuit en justice à tout va pour des écrits et même pour des blagues sur Facebook. On vous fait sentir que vous êtes une persona non grata tout en vous empêchant de bouger sous risque d'aller en prison. On vous demande d'écrire une lettre d'excuses afin de pouvoir voyager et la vous vous posez la question : qui doit s'excuser? Vous décidez de tenter le tout pour le tout afin de sauver ce qui vous reste tout en laissant derrière vous tout ce qui vous reste, mais vous avez trop milité pour la liberté d'autrui pour mettre de côté la votre parfois celle de la simple expression. Vous voyez des journalistes emprisonnés pour rien ou maintenus sous pression afin de les pousser à l'autocensure.... et puis vous n'en pouvez plus.... vous décidez de partir. Vous etouffez l'affaire, vous ne voulez pas utiliser votre statut d'opposante, vous êtes rattrapées par un pays voisin, après 3 jours de détention avec des criminels de droit commun vous êtes libérée par la juge, on vous interpelle muni de votre papier de libération. Vous dites : elle vient de me libérer la juge ou m'emmenez vous ? J'ai passé 3 jours en détention, je ne me suis pas changée ni douchée ni même mangé un seul vrai repas, ou suis je ? Tais toi ! Pourquoi m'enlevez vous le passeport que la juge m'a remis en main propre ? Pourquoi m'enfermez vous ici alors que personne n'est au courant ? Ou est l'avocat ? Asseyez-vous et taisez vous. C'est une séquestration ! Ça fait des heures que je suis ici ... dites moi juste pourquoi? J'avais dit à mes amis ne mediatisez pas SVP ! Je ne veux pas mettre la Tunisie dans la gêne entre deux pays dont j'ai la nationalité, j'aime la Tunisie autant que l'Algérie et je ne veux pas la mettre dans la gêne. Je veux juste aller voir mon fils et me sentir libre un instant loin de toutes ces pressions .... ne dites rien. Mais une fois séquestrée ce n'était plus possible. Vous leurs dites : faites pas ça c'est pas bon pour l'image de votre pays ! La juge m'a libérée elle est juge au nom de votre république .... vous ne pouvez pas aller à l'encontre de son jugement ! Taisez vous ! Ou est l'avocat ? Asseyez-vous et taisez vous ! ..... à travers une fenêtre vous voyez votre avocat : Maître ! Je suis séquestrée maître ..... et la .... vous qui disiez aux détenues : faut pas pleurer ça va aller ..... vous qui vous dites à chaque fois .... un militant ne doit pas pleurer ..... les larmes que vous avez tant retenu tous ces jours passé à être menottées puis enfermée ... vous ne pouvez plus les retenir. Vous dites .... je ne voulais pas politiser tout ça, je voulais juste aller à l'encontre d'une interdiction injuste contre ma liberté de mouvement .... c'est tout ce qui vous reste parfois quand vous avez tout perdu ... voir son fils ... pourquoi tout ce cirque ? Est ce que je risque encore d'aller en prison ? Puis ce souvenir de 20 gendarmes qui rentrent chez vous sous le regard effaré de vos enfants qui voient leur mère se faire interpeller comme un trafiquant ..... de post Facebook .... non ..... je veux pas revivre tout ça. Je remercie tout ceux qui ont fait en sorte que je ne me retrouve pas une autre fois derrière les barreaux. Je remercie les organisations Amnesty et human rights watch d'avoir lancé l'alerte. Je remercie les journalistes ainsi que les représentants consulaires ainsi que ceux de l'ambassade de France en Tunisie ainsi que tous ceux qui ont contribué de prêt ou de loin pour ma libération, les avocats qui ne m'ont pas lâchée. Je m'excuse auprès des proches ainsi que des amis que je n'ai pas informé de mon projet de départ momentané, ce n'est pas un exil. Je suis chez moi ici tout comme je le suis en Algerie ce pays pour lequel je me suis tant battue pour le voir Grand car il le mérite tant. Je suis chez moi la ou je suis libre d'écrire sans risquer à chaque fois de me retrouver derrière les barreaux pour une publication. Je suis chez moi la ou je ne vois pas la valse des journalistes en prison et des militants sans cesse malmenés pour des broutilles. Je suis chez moi la ou je peux dénoncer ce que j'estime être injuste sans me dire demain ils vont peut être venir me chercher. Je suis chez moi partout dans le monde mais un peu plus la ou je peux être moi sans avoir à être malmenée sans cesse juste pour quelques mots et une poignée de réflexions. Merci à vous tous de m'avoir soutenue malgré une campagne de dénigrement sous prétexte que je sois également détentrice de la nationalité Française tout comme mes enfants et ça ne date pas d'hier. Ça n'a jamais été un secret pour personne et je n'en éprouve aucune honte bien au contraire. C'est ça aussi le rapprochement ❤️. Ce n'est qu'un au revoir à très bientôt j'ai besoin de me reposer de tout ce qui vient de se passer. Je serais de retour très vite."
Mercredi soir, des médias algériens ont par ailleurs annoncé l'interpellation de Mustapha Bendjama, rédacteur en chef du journal Le Provincial à Annaba (est), non loin de la frontière avec la Tunisie. Avant son arrestation, il a dit à des collègues avoir été contacté au préalable par la police lui demandant "des informations sur la sortie d'Amira Bouraoui du territoire" et leur avoir répondu n'avoir "rien à voir avec cette affaire".
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